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24 janvier 2009 6 24 /01 /janvier /2009 15:58

 

 

(Publié dans U Ribombu, octobre 2005)

 

 

Le titre de ce roman peut ressembler à une provocation. Ces trois lettres évoquent pourtant mieux qu’un long discours la situation politique, sociale et morale de l’île que retrouve le narrateur après une longue absence. Mais si le titre surprend, le contenu ne relève pas davantage du politiquement correct. Dès les premières lignes, le lecteur sait qu’il ne s’enfoncera pas dans l’un de ces textes insipides dont l’édition nous submerge. Il comprend que l’auteur ne fait pas semblant de contester le cours des choses. Aujourd’hui comme hier, nombreux sont ceux qui se donnent des allures de rebelles, alors qu’ils évitent soigneusement de sortir des clous, en bons « mutins de Panurge » qu’ils sont. Paul Antonietti, en revanche, n’hésite pas à bousculer, à déranger, y compris - et surtout - ceux qui se reconnaissent dans sa vision de la Corse et du monde. En dernière analyse, se dégage de cette œuvre un profond humanisme. En illustrant, d’une manière très originale, cette perpétuelle relation dialectique entre la Corse et le reste de la planète, la plume corrosive - mais salutaire - de Paul Antonietti nous invite à nous réapproprier toute notre singularité, seule voie praticable pour accéder à l’universel.

 

                                                                                                 Jean-Guy Talamoni

 

 

EXTRAITS :

 

« Un jour, j’avais demandé à ma grand-mère si je pouvais rester, reprendre la vigne de la plaine, les jardins, le maquis et les châtaigniers. Tout était à l’abandon. (…) J’ai compris que, pour elle, rester, c’était déchoir. Partir, c’était s’élever, loin du regard des autres. Elle aimait Dieu, la France et de Gaulle – elle avait dû pleurer quand il avait quitté le pouvoir. Et puis mon grand-père, qui avait fait les deux guerres et ramené des décorations, je ne pouvais pas lutter contre ça. »

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« J’étais tombé par hasard sur le maire de Bastia, député et ministre (…). Comme je lui disais Monsieur le Ministre – il faut toujours commencer comme ça avec eux, il était ministre de la Réforme de l’Etat, ce qui avait fait rire toute la Corse et le monde politique, et confirmé la volonté du Premier Ministre de l’époque de n’engager aucune réforme en ce domaine – donc « Monsieur le Ministre, un jour j’aimerai retourner vivre dans notre île », il m’avait regardé, comme interloqué par une telle idée, avant de me répondre d’un ton méprisant : « Mais qu’est-ce que vous voulez retourner faire dans cette île ? il ne reste que des cons là-bas ! » J’en étais resté sans voix. « Mais qui t’a fait roi, toi, grande courge, maire de père en fils depuis des générations, député et ministre par héritage, toi qui pompes toute la moelle après avoir dévoré la bête avec ta clique et ton clan ? »

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« (…) nous ne sommes déjà plus en Occident . Ici, le temps est intérieur aux êtres et aux choses. C’est une donnée individuelle, ce n’est pas un impératif abstrait et collectif auquel on se soumet bêtement. S’affranchir du temps est le premier acte de liberté de l’homme sur cette terre, ce qui l’autorise à discuter, d’égal à égal, avec Dieu et tous les puissants, de la place qui lui a était donnée lors de la création du monde. Et il est rarement satisfait. »  

 

Paul Antonietti, « IFF », DCL éditions, 19 €.    

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Présentation

  • : Jean-Guy Talamoni
  • : Jean-Guy Talamoni est avocat. Président de l'Assemblée de Corse, il a publié deux ouvrages politiques, "Ce que nous sommes" (Ramsay/DCL, 2001) et "Libertà" (2004), ainsi que trois livres sur la langue corse.
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